samedi 30 novembre 2013

L’Université pour tous ? Pourquoi pas !


L’université Polytechnique de Gitega en Construction. Source: http://www.upg.edu.bi/

C’est avec joie que j’accueille la prolifération des universités privées sur le territoire burundais. Pour la démocratisation de l’enseignement. Un ancien ministre de l’enseignement supérieur sous Bagaza disait que la politique éducative d’alors était de laisser entrer 10% des écoliers a l’école secondaire et 1% à l’université. Si on se met à la place des autorités d’alors, on peut comprendre que les défis d’ordre matériel ou logistique ne les permettaient pas à laisser tout le monde accéder à l’enseignement. Le manque des enseignants qualifiés à différents niveaux, des classes et du matériel scolaire… peuvent être les causes de la super-sélectivité de notre système éducatif. Mais on ne peut pas compter sur un système qui refuse l’accès au savoir à la majorité des citoyens pour toujours. 

Nous devons arriver à un niveau où tous ceux qui veulent s'instruire, du primaire à l’université, puissent avoir l’opportunité d’accéder au savoir. On peut alors envisager l’université pour tous, du moins pour tous ceux qui le veulent et le peuvent. De cette démocratisation du savoir dépendra aussi le « développement » de notre pays le Burundi. Les universités privées participent largement à cet effort. Outre la vingtaine d’universites et instituts supérieurs concentrés à Bujumbura, les provinces s’équipent de plus en plus d’instituts universitaires. Bururi, Gitega, Mwaro et Ngozi ont déjà au moins une université. Des projets d’implantation d’autres universités sont en cours, surtout dans les provinces de Bubanza et de Muyinga. L’Université des Grands-Lacs prévoit d’ouvrir de nouveaux campus dans les provinces de Makamba et de Rutana. Dans un proche avenir, nous verrons chaque province dotée d’une institution d’enseignement supérieur, et je trouve que c’est une très bonne chose pour notre pays. Les jeunes n’auront plus besoin de devoir affronter la cherté de la vie de Bujumbura pour accéder à l’enseignement supérieur. 

Aujourd’hui je suis passé à la Direction Provinciale de l’Enseignement pour voir les résultats de l’examen d’Etat des élèves. Tout le monde était étonné, moi aussi. Pour la première fois je pense, la grande majorité de ceux qui ont fait l’examen d’Etat ont plus de 50% qui leur donne l’accès à l’enseignement supérieur.  Selon une source digne de foi, 7000 étudiants sont attendus dans l’unique université publique, et 10.000 autres ont été « cooptés » pour les universités privées. Même ceux qui n’ont pas eu le Diplôme d’Etat peuvent continuer leurs études dans les Instituts et décrocher leur ‘Baccalauréat professionnel » après 3 ans d’études. Donc les portes de l’Enseignement supérieure sont grandement ouvertes.

On peut toujours s’interroger sur le rendement de ces universités, sur la qualité de l’enseignement qui y est dispensé. C’est un autre débat. 

Le grand défi de cette démocratisation de l’enseignement reste l’accès à ces universités privées qui est toujours réservé aux privilégiés, à une minorité capable de s’acheter les services de ces institutions.   La majorité des familles burundaises restent incapables de trouver la somme qui en moyenne varie entre 300 000 et 500 000 francs bu exigés par an pour que leur enfant puisse fréquenter une université privée.

lundi 25 novembre 2013

Citoyens vigilants


Des membres du FOCODE

Je fais partis des 280 membres que le FOCODE (Forum pour la Conscience et le Développement) vient d’accueillir dans ses rangs au Lycée Scheppers Nyakabiga il y a quelques heures. En tout, nous venons de totaliser 1800 membres du FOCODE. N’en déplaise au ministre de l’intérieur Edouard Nduwimana qui prétend que le FOCODE n’a que moins d’une centaine de membres. 

En voyant ma lettre d’admission, je n’ai cessé de penser a la fameuse vidéo où le même ministre s’acharne sur le FOCODE en le faisant passer pour un parti politique : « Le FOCODE est carrément un parti politique, et de l’opposition ». Thierry Uwamahoro a suffisamment dénoncé les mensonges du ministre, je ne vais pas m’y attarder.   

J’ai choisi d’adhérer au FOCODE parce que c’est une organisation qui s’est donné la mission de former les « IMBONEZA Z’UBURUNDI », les leaders. Le FOCODE est l’une des organisations de la société civile qui ont le plus de membres, et pas n’importe lesquels. La majorité sont des étudiants, d’autres sont des élites dans différents domaines et toutes composantes ethniques confondues : avocats, médecins, universitaires… Le FOCODE donne une éducation civique tellement riche, ce  qui fait que ses membres sont très sensibles aux injustices et n’hésitent pas à dire non même si un seul citoyen subit l’injustice. Cette vigilance inquiète certains. C’est peut-être pour toutes ces raisons que le FOCODE est souvent la cible du ministre de l’intérieur parmi les centaines d’autres organisations de la société civile.  

Bien sur, le FOCODE ne serait pas ce qu’il est nul n’était le courage de son infatigable président Pacifique Nininahazwe qu’on trouve sur tous les fronts, et dont la détermination, inspirée à la fois de Rwagasore et de Martin Luther King, ne cesse d’inspirer nous autres jeunes qui croyons encore que le combat pour la justice et la liberté est un combat de chaque jour et que nous devons gagner peu importe le temps que ca prendra. 

Le FOCODE a été créé en 2001 par 27 étudiants qui voulaient refuser la division qui régnait dans les enceintes de l’université de Burundi  depuis les massacres d’étudiants hutus en 1995. Ils se sont alors assigné de refuser la haine et la violence d’où qu’elles viennent et de chercher le dialogue qui est le fondement de la stabilité de toute nation.  Ce sont ces valeurs, qui sont aussi les miennes, qui m’ont poussé à rejoindre cette famille de « citoyens vigilants ».

samedi 23 novembre 2013

Pour nos medias: Une leçon mozambicaine pour 2015



Un Burundais qui a vécu 8 ans au Mozambique, Hilaire Urinkuru, pense que la façon dont les médias ont couvert les élections au Mozambique devrait servir de leçon pour les médias burundais pour les élections de 2015:

Les médias sur les réseaux sociaux jouent un rôle sans égale ! Ce rôle a été on ne peut plus apparent au cours des élections municipales au Mozambique avant-hier le 20 Novembre 2013. Les médias informaient le public de tout évènement sur tous les bureaux des votes via Twitter et surtout Facebook et ont contribué par conséquent à dénoncer toute fraude et à stopper toute tentative de fraude. 

Le public a pu être informé par exemple de l’existence des électeurs à plusieurs cartes d’électeurs, d’électeurs qui recevaient plusieurs bulletins de vote parce qu’ils allaient voter pour le parti au pouvoir, de l’intervention de la police pour aider le parti au pouvoir dans ses tricheries en enlevant des urnes et les ramenant plus tard, de la découverte des urnes préalablement remplies des votes en faveur des candidats du parti au pouvoir, de la saisie d’un chèque de 250 mille Meticals (monnaie mozambicaine) destiné à acheter les procès-verbaux sur les lesquels les candidats de l’opposition étaient vainqueurs, de la publication par le site web du Secrétariat Technique de l’Administration des Élections (STAE) des faux résultats pour les candidats d’oppositions puis, leur rectifications après la dénonciation alléguant que leur site web aurait été attaqué.

A ce rôle des médias s’ajoute sans doute les efforts exceptionnels des délégués des partis d’opposition aux bureaux de votes qui ont enduré les tracasseries de la police et ceux des membres du bureaux de vote appartenant du parti au pouvoir.

vendredi 22 novembre 2013

Quid du référendum ?




A ceux qui demandent de larges consultations afin que la Constitution révisée soit consensuelle, le gouvernement répond qu’il compte amener le projet devant un référendum populaire. « Un référendum est plus acceptable que tout autre débat », a même affirmé un lecteur de notre blog. Ce qu’un autre lecteur en pense:

« Je suis de l'avis que la consultation populaire par voie référendaire s'impose comme un modèle de démocratie directe sur une question d'ampleur comme amendement ou abrogation de la constitution. Néanmoins, force est de constater que les réalités burundaises sont autres, car les citoyens sont instrumentalisés autour des cliches divisionnistes qui ne rassurent pas nombre de citoyens. Transposer alors des pratiques de consultation acceptable dans les sociétés avancées dans un pays délabré par des crises de divisions politico-ethnique s'annonce pour moi irrationnelle. Les politiciens et les acteurs de la société civile, les congrégations religieuses, les syndicats des travailleurs et tout autre citoyen libre sont les plus avisés car plus éclairés que le peuple qui sombre encore dans l'obscurantisme et ignorance des modèles de gouvernement ».

Un autre :
« Si demain matin on appelait tous les burundais à voter pour ou contre cette Constitution, je suis de ceux (et je parie une très grande majorité) qui ne saurons pas ce que nous serons en train de voter. Chaque jour, j’apprends des lacunes graves et des modifications très fantaisistes (qui sont peut être là pour des intérêts sectaires inavoués) cachées dans ce projet; mais qui, a la première lecture novice et naïve, paraissent inoffensives. Pour avoir un referendum digne de son nom, il faut un large débat, il faut que ces/nos politiciens et d’autres acteurs de la vie nationale (y compris des experts constitutionalistes) en discutent (et publiquement), il faut une analyse profonde de chaque modification pour que nous puissions comprendre ce que chaque modification améliore ou nous coûte. Aujourd’hui, j’entends qu’on est en train de raconter aux pauvres citoyens que voter pour serait voter pour la gratuité des soins de santé et de la scolarité (alors que ça n’a rien à voir !)…une telle démarche ne pourra que nous amener vers un abysse. Ouvrir le débat serait une marque de bonne foi pour les instigateurs de cette modification et ne pourra que contribuer à notre réconciliation nationale qui avance (et qu’il ne faudrait pas saboter pour des intérêts de quelques politiciens)… »

En ce qui me concerne, je pense aussi que si la Constitution doit être révisée (je suis de ceux qui pensent qu’il n’y a pas urgence), un consensus est nécessaire d’abord chez les différents acteurs de la vie publique, avant que le texte soit soumis au référendum. Sur un projet aussi important, le peuple doit aussi s’exprimer. Mais au référendum, le peuple approuve ou rejette ce qu’on lui donne. Et par expérience, le peuple burundais n’a jamais dit NON au référendum, jamais. Ce qui veut dire que même aujourd’hui, la probabilité que le peuple rejette un texte de loi, soit-il mauvais, est très minime. Il faut donc être réaliste et honnête si nous voulons réellement un texte qui favorise la cohésion sociale. Le dialogue a déjà tiré le Burundi des décennies de guerre civile. Encore une fois, c’est lui qui nous sauvera.